Humble je suis, mais je propose ici de refaire la stratégie du Monde.
J’ai été élevé avec Le Monde qui a toujours été un journal de référence. Mais je constate depuis quelques temps que la qualité et la profondeur des articles a baissé et qu’il n’y a souvent plus le travail journalistique qui a fait la marque. Je la retrouve dans Mediapart. Je présente ici une ébauche de stratégie possible.
L’objectif
Faire du Monde la source de référence de l’information généraliste, le point d’entrée pour s’informer.
Ne pas être compétition avec les journaux spécialisés, mais être le point de passage vers ces journaux.
L’idée
L’idée est d’avoir au cœur du dispositif une base d’information qui va être alimentée, conservée, valorisée et diffusée.
C’est une rupture avec l’idée d’une information toujours nouvelle qui pousse la précédente et disparaît. Elle est ici conservée et exploitée à son maximum dans le temps et dans sa valeur.
Le cycle de l’information en général part de l’information brute/basique, qui est ensuite décortiquée, recoupée, croisée pour donner une information de valeur. Le tout est mis à disposition pour être utilisé et analysé. En tant que lecteur, je satisfais ainsi à 3 besoins, m’informer, comprendre et analyser. C’est également le cycle de l’intelligence économique qui grâce à un réseau de capteurs (informations brutes) récolte l’information, qui est ensuite décortiquée, recoupée, croisée par un expert du sujet (information valorisée). Le tout crée une base de données de qualité qui peut être utilisée, analysée et partagée.
Source http://www.slideshare.net/psst/valeurdelinformationecritepart2-1114293
Mon idée est d’associer un réseau d’experts, des journalistes, des marketeurs et les lecteurs. Et ensuite de valoriser tous les niveaux de traitement de l’information. Rien ne se perd, rien ne se jette.
Les premiers sont à la fois les capteurs de l’information et ceux qui aident à créer de l’information de valeur. Les seconds sont les éditeurs ou les metteurs en scène de ces informations à travers une ligne éditoriale et une méthode de croisement, mise en perspective de l’information. Ils vont digérer les informations des experts professionnels pour le grand public. Le travail des troisièmes est de valoriser ces informations, analyses et autres dans la jungle de l’information et du temps de cerveau disponible des lecteurs. Les lecteurs sont en premier des consommateurs, mais aussi des promoteurs de la marque et de futurs experts.
Les offres
L’objectif est de rendre la marque omniprésente. Si une personne veut s’informer, elle consulte Le Monde. Où quelle soit, et quel que soit son média (radio, télévision, web, mobile,….). Puis de faire monter le lecteur dans la chaine de valeur.
Sur le principe de la remontée de l’information, je propose 3 offres grand public qui suivent le tunnel d’engagement et une 4eme pour les professionnels. Les pourcentages associés aux cibles sont simplement des ordres de grandeur.
>Offre 1
Cible : la masse (80% des lecteurs). Les personnes qui veulent s’informer. Ils veulent les 20 informations du jour. C’est l’offre 20 minutes.
C’est une offre gratuite, disponible sur tous les supports possibles, qui propose des faits certifiés, triés avec une mise en page de l’information selon le support (mais Flipboard fait ça très bien).
Source de financement : la publicité, la syndication sur d’autres médias, et autres….
>Offre 2
Cible : les lecteurs avertis (19%). Les personnes informés qui veulent comprendre. Elles veulent des informations croisées, décryptées, des points de vues contradictoires et respectueux, des mises en perspective et des analyses.
C’est une offre payante par abonnement ou à l’article qui présente par domaine (politique, internationale, économie, culture,…) chaque jour le fait du jour expliqué (texte, vidéo, infographie,….) et régulièrement une enquête différentiante de la concurrence et introuvable ailleurs. C’est l’offre Mediapart.
>Offre 3
Cible : les acteurs (1%). Les personnes qui veulent manipuler eux-mêmes les données pour comprendre, analyser et créer quelque chose de nouveau.
C’est une offre à deux niveaux. Un service basique et gratuit de recherche de l’information (les informations brutes, des bases de données, des documents rendus publiques) avec un API. Comme l’offre 1, il permet de placer Le Monde comme référence de l’information, et de diffuser la marque (“la source des informations est Le Monde”). Un ou plusieurs services premium d’utilisation de ces données, avec par exemple, un nombre de recherche illimitée, des outils de cartographie ou de mise en perspective de l’information….
>Offre 4
Cible : les professionnels. Ils veulent les informations de leur profession.
C’est une offre payante, chère, qui propose en direct les informations des experts reconnus. C’est l’offre qui doit presque rentabiliser l’ensemble et surtout l’offre 1 et l’offre 3 basique.
Les moyens
Les moyens sont actuellement un problème pour un quotidien comme Le Monde. Il s’agit donc de tout utiliser et valoriser.
>Les experts
Ce sont des professionnels de leur domaine, au sein du journal, mais majoritairement en dehors, qui font d’abord et tous les jours le travail qui a fait d’eux des experts reconnus dans leur domaine. Ils ne sont donc pas obligatoirement journalistes. Pour faire leur travail, ils font naturellement de la veille, de la récolte d’information brute, et son analyse; Le journal les paye pour partager leurs sources (offre 3 basique et 4), les informations brutes triées et qualifiées (offre 1, 3 basique et 4) et les analyses (offre 2 et 4). Ils ne font donc pas beaucoup de travail en plus, mais il est vraiment, voir doublement, valorisé. Tout le monde est gagnant. A terme, il faut que le titre d’expert du Monde soit une reconnaissance, afin d’attirer d’autres experts et de monter en qualité.
Je pense aussi que les journalistes spécialisés sur une niche ou des journalistes d’un autre pays qui travaillent pour un journal ou média d’information local doivent être considérés comme des experts.
>les journalistes
Ce sont des professionnels de l’information. Ils sont la seconde garantie de qualité avec les experts. Leur rôle est de coordonner et d’animer les experts, de mettre en scène l’information brute, et surtout les analyses. Ils trouvent le bon angle d’attaque, la présentation qui fera la différence. Ils garantissent que les principes journalistiques historiques de qualité de l’information sont respectés.
>Le Marketing
Dans ce monde d’hyperchoix, où être atteignable c’est bien, mais être atteint c’est mieux, leur travail est qu’une personne en recherche d’information ou d’analyse choisissent Le Monde, ou sinon qu’elle sache qu’elle lit une information proposée par Le Monde (syndication). Toujours dans l’esprit de réutilisation des moyens, l’offre 1 est leur matière principale pour diffuser au maximum/à outrance les informations en mode ATAWAD (Any Time Any Where Any Device). Selon les opportunités, les cibles, les promotions, etc…, il est possible de mettre à disposition gratuitement une analyse qui permettra de montrer la valeur et de faire passer les lecteurs en gamme. Je ne m’étends pas sur le travail indispensable d’analyse des données de diffusion et de transformation qui vont permettre d’optimiser ce travail.
>Les lecteurs
Je passe rapidement ici sur la nécessité d’avoir une perméabilité forte avec les lecteurs, à travers les commentaires, les blogs, le club des lecteurs, des endroits d’échanges entre lecteurs,…. Ceci renforce l’engagement vis-à-vis du journal et donc la fidélité, source d’abonnement et de stabilité financière.
>Les autres
Rapidement il y a évidemment des besoins en informatique et surtout en travail de mise à disposition des informations de l’offre 4.
Je suggère également d’arrêter la diffusion papier qui est, du fait de l’impression et de la matière première, un poste de dépense majeur. Le gain n’est pas de 100% puisqu’il y a un travail important de mise à disposition des contenus sur un maximum de devices et de support (qui peut s’apparenter à de l’impression), mais il est non négligeable.
Le cycle de vie
Dans un monde en mouvement, il faut être soi-même en mouvement permanent. Le renouvellement des experts qui apporte la totalité des informations et donc la matière première au journal est nécessaire. Il est assuré par 2 choses, le travail permanent et organisé avec les lecteurs, dont certains sont des experts dans leur domaine, pour les impliquer de plus en plus en les faisant participer, afin qu’ils deviennent des experts du journal, et ensuite une mise en avant et la valorisation des experts en place afin d’en attirer d’autres en quête de reconnaissance.
Ceci est une simple ébauche qui est une base à la discussion. Qu’en pensez-vous?