Nous parlons sans cesse de l’apparition de l’ebook, la nouvelle forme digitale du livre papier. Mais l’ebook existe depuis longtemps. Ce fut une… calculatrice.
Ces temps-ci, et je peux me permettre d’affirmer que ça va durer un certain temps encore, on ne parle que l’apparition et de l’expansion du livre numérique. Par ici une discussion pour savoir s’il est homothétique ou augmenté. Par là, un échange pour savoir si une application avec du texte et de la vidéo est un livre, un cd-rom ou une application. Ces discussions sont nécessaires parce qu’elles accompagnent le passage du papier au digital. Elles racontent les angoisses pour retrouver des repères et sont une projection courte des savoirs faire du livre papier dans l’inconnu digitale. Elles sont un peu l’allégorie de la caverne par Platon pour le monde du livre. Et tout ce qui sera fait pour préserver le livre papier comme support universel du texte sera vain et perdu d’avance. Alors une petite histoire pour dire que tout a déjà commencé depuis fort longtemps.
Au début des années 80 est apparue la calculatrice grand public à un prix modique. A cause d’elle des livres ont disparus. Elle était le premier eBook (évidemment une assertion à vérifier, mais j’ose parce que cela ne changerait pas la démonstration). Pas très digitale tout ça, mais très électronique.
Précisément, elle a remplacé les livres papier de tables numériques (un peu de Wikipédia ici), comme par exemple les livres de tables de logarithmes ou ceux de tables trigonométriques. “À l’aide de ces tables (souvent calculées avec 5 à 10 chiffres significatifs, voire plus pour certaines fonctions), on pouvait rechercher les valeurs à utiliser dans les formules données, et obtenir de très bonnes estimations de certaines fonctions”
Pour la fonction de répartition, par exemple : pour Φ(0,42) = 0,66273, on choisira 0,4 en ligne et 0,02 en colonne (0,4 + 0,02 = 0,42) et l’intersection nous donnera le résultat.Pour plus d’explications, c’est par là.Pour faciliter les calculs numériques, le livre était à l’époque et pour longtemps le meilleur moyen pour ce besoin de calcul. La règle à calculer est bien venue jouer les trouble-fêtes, mais pas pour tous les calculs. Nous parlons donc ici d’un livre, avec du papier et de gros morceaux de texte dedans. Et un jour est apparu un truc assez génial, au début réservé aux professionnels pour des usages professionnels, avec quelques touches assez ergonomiquement placées et un petit écran pour afficher quelques caractères, mais pas tactile du tout, qui permettait de faire les calculs du bon des doigts. Et alors d’un coup, plus besoin de livres remplis de tables numériques… hop tous à la poubelle, sauf un pour le musée. Parce que pour le besoin de calcul, le livre papier n’était plus le meilleur moyen. Point. Je me demande si quelqu’un a essayé de refaire des livres avec des calculs plus puissants dedans. Un truc papier tellement génial qu’il pouvait freiner le déferlement des calculatrices. Peut-être. Mais aujourd’hui je peux affirmer que la calculatrice a gagné comme moyen de faire des calculs (un peu concurrencée dernièrement par les téléphones portables). Et je me demande aussi si quelqu’un pouvait imaginer tout ce que l’on pourrait faire que le livre ne permettait pas avec les nouvelles versions des calculatrices.
En dehors du fait un peu rigolo de voir qu’une calculatrice est un ebook, même si je le pense réellement, je voudrais montrer ici que le livre papier a de multiples usages et qu’il répond à de nombreux besoins. Ceci parce qu’il est et était le meilleur moyen ou support pour ce besoin à un moment donné. Dès qu’il n’est plus le meilleur, il est remplacé. J’ai déjà évoqué ces changements dans ce billet. Il ne faut pas se demander comment conserver le livre papier, mais s’il est toujours le meilleur pour répondre à un usage.
Les guides touristiques sous forme de livre papier vont bientôt disparaitre. Ils ont commencé. Notre besoin en visitant Rome n’est pas d’avoir un livre papier, mais une information sur le monument que nous regardons ou le meilleur restaurant à 5 min à pied. Le livre papier a été le meilleur pour ce besoin. Aujourd’hui un iphone ou tout autre smartphone est meilleur. Et en plus il fait plus. Point.
J’en profite pour remercier Patrick Altmann, qui a énoncé l’idée de la calculatrice lors de la rencontre sur le moment eBook de L’Atelier Français.